80 %
des déchets en mer sont des plastiques
90 %
du nombre de plastiques en mer sont des microplastiques
24 000 milliards
de microplastiques flottent à la surface des océans
Comment le plastique se fragmente-t-il en microplastiques et nanoplastiques ?
Les microplastiques secondaires, les plus nombreux, sont le résultat de la fragmentation de déchets plus gros, nommés « macroplastiques » lorsqu’ils se retrouvent dans la nature. Ces déchets venant majoritairement de la terre finissent très souvent en mer, entraînés par la pluie jusqu’aux rivières et aux fleuves. Certains sont également rejetés directement en mer. Les nombreuses agressions (vent, rayonnement UV, oxygène, température…) qu’ils subissent au cours de leur périple les altèrent et les fragmentent en des particules plus petites. La moitié de ces microplastiques secondaires provient des emballages alimentaires, en grande majorité à usage unique, avec une durée d’utilisation très courte.
D’autres microplastiques, appelés microplastiques primaires, arrivent dans l’environnement déjà à l’état de microplastiques. Ils proviennent par exemple de fibres textiles venant du lavage en machine à laver, de granulés ou microbilles plastiques, de fibres de filets de pêche ou de fragments de pneumatiques.
5 millimètres
Diamètre en-dessous duquel les déchets sont appelés microplastiques. C’est la taille d’un grain de riz rond.
1 micromètre
Diamètre en-dessous duquel les déchets sont appelés nanoplastiques. C’est la taille d’une bactérie, soit 10 fois plus petit que le diamètre d’un cheveu.
Quelle quantité de micro et nanoplastiques dans l’océan Atlantique ?
Historiquement, les données sur la pollution en mer se basaient principalement sur les macroplastiques qui se regroupent au niveau des (sidenote: Gyres Les gyres sont de gigantesques tourbillons océaniques créés au point de convergence de plusieurs courants marins. Ce phénomène est similaire au tourbillon de lavabo. Ces gyres sont alors des zones où la concentration en plastiques est forte. ) . Depuis 2010, l’Ifremer, en collaboration avec d’autres instituts, développe la récolte de données sur les microplastiques sur l’ensemble du globe, notamment avec des programmes d’observation des microplastiques flottants, basés sur des prélèvements d’eau dans différentes régions du monde jusqu’en Antarctique.
Toutes les zones de l’océan suivies par l’Ifremer sont contaminées, mais à différents niveaux. Une partie du travail des chercheurs est de quantifier la pollution présente autour du globe.
Des actions sont mises en place avec des partenaires, afin de réaliser des relevés dans des zones peu visitées par les chercheurs. Par exemple, la fondation Ocean Calling du skippeur Fabrice Amedeo réalise, depuis 2020, des prélèvements lors de ses courses comme le Vendée Globe ou la transat Jacques Vabre. Son bateau de course est équipé de capteurs qui filtrent et collectent les microplastiques en continu. L’Ifremer se charge ensuite de l'analyse afin de déterminer la répartition des microplastiques sur l’ensemble de l’océan Atlantique.
La présence du plastique sur le littoral
La présence de plastique au niveau des côtes dépend des usages (pêche, ostréiculture, densité des villes, station d’épuration, estuaires…). La contamination dans ces zones n’est donc pas homogène sur le globe.
Pour pallier le manque de données, l’Ifremer a mis en place des programmes en zones côtières notamment en Rade de Brest, en Corse, dans la baie des Veys (Calvados) ou en rade de Marseille et dans des zones spécifiques comme dans les lagons en Polynésie Française.
Comment sont prélevés et identifiés les micro et nanoplastiques ?
- Les prélèvements se font par pompage depuis la surface de l’eau, (sidenote: Carotte de sédiment C’est un échantillon de sol sous-marin, prélevé à l’aide d’un carottier envoyé au fond depuis un navire de recherche. Ce carottier permet d’extraire une « carotte », souvent cylindrique : un tube de sol sous-marin long de quelques centimètres à quelques dizaines de mètres de longueur. ) , à l’aide de ROV comme Victor 6000…) ou grâce à des filets (filets manta et neuston, prélèvement horizontal en surface ; filets bongo et à plancton, prélèvement vertical dans la (sidenote: Colonne d’eau Le volume d’eau compris entre le fond et la surface. ) )
- Ces prélèvements sont analysés en laboratoire avec des mesures physico-chimiques pour caractériser les plastiques (Raman, FTIR...)
Les travaux de recherche de l’Ifremer ont montré que la Méditerranée est la zone la plus affectée du monde. Cela est dû à la fois à ses faibles échanges avec l’Atlantique, à son important trafic maritime, la densité des villes qui la bordent et à la gestion de leurs déchets sur le littoral.
À contrario, la rade de Brest, où les courants vers l’océan Atlantique sont très présents, est moins contaminée. La rade compte tout de même environ 30 millions de particules plastiques de diamètre supérieur à 330 micromètres.
En Polynésie Française, malgré la faible densité humaine, la pollution plastique est présente. Elle tient ses origines de deux grandes sources : les déchets extérieurs apportés par une convergence des courants dans cette zone et les déchets issus de la production d’huîtres perlières dans les lagons.
L’Ifremer apporte, avec l’OFB, un appui technique et scientifique au ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires dans la coordination nationale de la Directive-Cadre « Stratégie pour le Milieu Marin » (DCSMM), notamment sur la question des déchets marins en Méditerranée. L’Ifremer a notamment pour mission l’évaluation de la présence des déchets marins et des microplastiques sur la façade maritime.
Les microplastiques et nanoplastiques perturbent les organismes marins
Quand on évoque la pollution plastique en mer et ses conséquences sur les animaux marins, on pense rapidement aux tortues de mer étouffées par les sacs plastiques. Mais cela touche bien plus d’espèces, surtout lorsque ces plastiques sont assez petits pour être ingérés et confondus avec leur alimentation. Cela est le cas par exemple pour le zooplancton, les poissons ou les organismes filtreurs (huîtres, moules…), ou indirectement, lorsqu’un animal marin consomme une proie déjà contaminée. En suivant la chaîne alimentaire, ces particules de plastiques peuvent potentiellement arriver jusque dans nos assiettes.
Les scientifiques de l’Ifremer réalisent des expérimentations en laboratoire pour comprendre le phénomène de contamination et les impacts sur les organismes marins. Ils mettent en place des scénarios réalistes afin d’avoir une « copie » de ce qui se passe dans la nature. D’autres scénarios sont réalisés pour exagérer la réalité dans le but de comprendre comment les organismes marins et leurs mécanismes réagissent à la contamination et de déterminer les seuils de toxicité au sein du vivant. En milieu naturel, les expérimentations sont compliquées, il y a trop de paramètres et d’autres éléments polluants (pesticides, métaux lourds, etc.) à prendre en compte.
L’Ifremer se concentre sur l’étude de l’impact des microplastiques et nanoplastiques sur les organismes marins qui ont des intérêts écologiques, alimentaires et économiques : huîtres en Bretagne ou en Polynésie Française, moules en Rade de Marseille, poissons…
L’huître au centre des recherches
Les recherches de l’Ifremer sont principalement centrées sur les huîtres creuses, plates et perlières. Celles-ci ont un intérêt écologique majeur : c'est une espèce ingénieure de l'écosystème qui abrite une grande biodiversité et qui est sensible aux pollutions. Elles présentent aussi un intérêt économique (alimentation, perliculture).
Les scientifiques de l’Ifremer ont montré que les microplastiques et nanoplastiques ont deux grands types d’effets sur les huîtres.
- Des effets chimiques. Les plastiques, quelles que soient leurs tailles, libèrent des molécules chimiques dues aux additifs et autres composants qui sont ajoutés. Ces molécules, ingérées par les huîtres, peuvent notamment causer des perturbations endocriniennes. Les scientifiques de l’Ifremer ont démontré que les objets neufs sont plus toxiques. Ils relarguent plus de molécules chimiques que les objets usés (études réalisées sur différents types d’objets : coton, cotons BIO, élastiques ostréicoles, caoutchouc type pneumatique...).
- Des effets physiques. Lorsqu’ils sont ingérés par les huîtres, les micro et nanoplastiques peuvent causer :
- Une perturbation de la nutrition : ils prennent la place des aliments, ce qui déséquilibre l’apport énergétique ;
- Des problèmes de reproduction : les huîtres ont alors moins d’énergie et de nutriments nécessaires à certaines grandes fonctions (croissance, reproduction, défenses immunitaires…) ;
- Des incidences sur la production de perles (Polynésie Française). Les perles sont alors de moins bonne qualité, ce qui a des répercussions économiques majeures.
Des impacts sur les poissons
De manière globale, le transit de plastiques dans le système digestif d’un organisme a un impact sur son système biologique et peut provoquer des difficultés de déplacements et de défense pour les poissons.
Une équipe de scientifiques de l’Ifremer a pu mettre en évidence qu’en-dessous de 50 nanomètres les particules pouvaient passer la membrane digestive des poissons. Les morceaux inférieurs à cette taille (nanoplastiques) peuvent alors entrer dans le système sanguin de l’animal et avoir des répercussions plus graves.
Lutter contre les microplastiques en mer
L'Ifremer travaille avec des institutions, des acteurs et décideurs locaux pour la mise en place d'actions concrètes sur le territoire : récolte des déchets, filets de rétentions, sensibilisation du grand public notamment en milieu scolaire.