Les perles noires de Tahiti
Les perles de Tahiti, uniques au monde, représentent une activité économique très importante en Polynésie Française. Les recherches de l’Ifremer ont permis de comprendre le cycle de vie de ces huîtres productrices de perle, leur reproduction et les mécanismes de biominéralisation de la perle (calcification et minéralisation).
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L’activité perlicole est la deuxième activité économique de la Polynésie Française après le tourisme
Les recherches de l’Ifremer sur les huîtres perlières ont débuté dans les années 1990 dans un contexte d’aide au développement de cette activité d’aquaculture. Dans les années 2000, la filière a choisi de mettre la priorité sur les quantités produites, entraînant une surproduction et une baisse du niveau de qualité des perles (taille, forme, couleur, lustre). Cette baisse de qualité a causé une chute importante du prix de la perle. Dans ce contexte, à partir des années 2010, les scientifiques de l’Ifremer ont axé leurs travaux sur cette problématique de la qualité. Les recherches se sont notamment focalisées sur le décryptage du génome de l’huître perlière : éléments génétiques déterminant la qualité ou bien encore démonstration de la faisabilité de la sélection génomique pour aider à produire des perles de meilleure qualité.
La production des huîtres perlières est encore dépendante de la collecte dans le milieu naturel de jeunes huîtres perlières (nacres), utilisée pour le greffage. Cette opération consiste à introduire un nucleus (fragment sphérique de coquille de moules en général) et un morceau de tissu de manteau d’une huître donneuse dans une huître receveuse. Ainsi ce nucleus va être recouvert d’une couche de nacre qui donnera naissance à une perle. Malgré la capacité d’adaptation de l’huître perlière au changement climatique, la collecte de nacres est déjà impactée dans certaines zones de la Polynésie Française. Dans l’archipel des Gambier, par exemple, les populations naturelles sont en baisse et dans l’archipel des îles Sous-le-Vent, il n’y a plus de production naturelle.
L’Ifremer a initié des travaux de recherche pour accompagner le développement d’écloseries afin, non seulement, de mieux contrôler la qualité des perles (sélection génomique) mais aussi de répondre au besoin en nacres dans le cas de déficit de collectage.
La pollution plastique, un problème majeur en Polynésie Française
La pollution plastique est un sujet très important en Polynésie. L’industrie perlicole est très consommatrice de plastiques (cordage, lignes de bouées, ombrières pour la collecte des nacres…) et elle se concentre notamment dans des zones restreintes à cause des activités présentes dans les atolls. Certains déchets sont également laissés à l’abandon dans les fonds.
L’Ifremer réalise de nombreuses recherches sur le sujet de la pollution des microplastiques et des nanoplastiques ainsi que sur l’impact des substances chimiques. Des travaux se sont notamment focalisés sur l’impact des microplastiques sur l’huître perlière, sa physiologie, sa reproduction et son écosystème.
L’Ifremer acteur de la recherche en Polynésie Française depuis 1970
Les recherches de l’Ifremer en Polynésie Française se sont, dans un premier temps, concentrées sur la crevetticulture jusque dans les années 1990. Le centre Ifremer de Vairao était alors leader mondial en termes de recherche, de développement et de transfert auprès d’entreprises dans le monde concernant l’élevage des crevettes.
Des années 1990 à 2000, les scientifiques de l’Ifremer ont contribué au développement de la pisciculture. Ils se sont concentrés sur les espèces lagonaires comme le poisson chauve-souris Platax orbicularis, espèce emblématique des lagons en Polynésie Française avec un enjeu économique et une problématique de maladies infectieuses.
À partir des années 1990, le centre de Vairao a également aidé le développement de la culture des huîtres perlière. La perliculture constitue une des étapes importantes dans le développement de l’aquaculture en Polynésie Française.
Le centre Ifremer de Vairao
L’Ifremer est présent dans le Pacifique et notamment à Vairao en Polynésie Française. Son principal objectif est d’accompagner le développement de l’aquaculture dans cette région tropicale. La plateforme expérimentale de Polynésie française à Vairao est dotée d’infrastructures et de moyens humains permettant de mener à bien leurs recherches.
La diversification des activités aquacoles en Polynésie Française
Le développement de l’aquaculture en Polynésie Française passe par la volonté de diversifier les activités aquacoles déjà présentes sur le territoire. Cette pratique a pour but de ne pas centraliser la production sur une seule espèce et d’acquérir une capacité de résilience face à de potentiels problèmes qui mettraient en péril l’économie locale.
Cette diversification concerne notamment des espèces déjà développées localement comme le Platax orbicularis, un poisson de lagon, ou encore l’huître de bouche, aussi appelée huître de roche en Polynésie. D’autres activités aquacoles sont en cours de développement sur des espèces telles que l’oursin, l’holothurie (ou « concombre de mer ») ou le bénitier.
Le développement de ces activités est réalisé en lien avec les producteurs locaux et les entreprises telles que Tahiti Marine Products pour l’holothurie ou Ostrea Tahiti pour l’ostréiculture.
Des travaux sont également mis en place sur la capacité adaptative de ces espèces. L’huître de roche, l’holothurie et l’oursin seront-ils résistants aux scénarios climatiques à venir ? Ces espèces sont-elles intéressantes d’un point de vue environnemental ?
Des activités aquacoles avec moins d’impact sur l’environnement
L’aquaculture a également des impacts sur l’environnement et les écosystèmes. L’Ifremer développe des travaux afin de comprendre de quelle manière l’environnement peut être déstabilisé par la présence d’une activité aquacole. Des travaux sont mis en place pour trouver des solutions comme la mise en place de systèmes d’aquaculture multi-trophique intégrée. Le principe est d’utiliser les rejets d’une aquaculture pour en nourrir une autre, par exemple, utiliser les rejets de la crevette pour produire du phytoplancton pour la production d’huîtres de roche. Ce système permettrait de faire un lien entre la crevetticulture et l’ostréiculture, deux activités importantes en Polynésie Française.
Un des enjeux sociétaux des décennies à venir est la sécurité alimentaire dans le contexte de l’augmentation de la population mondiale. Le défi est de produire des protéines avec un faible impact sur l’environnement. L’Ifremer s’intéresse à cette problématique en développant des filières avec des espèces « à bas niveau trophique » comme l’oursin, l’holothurie ou l’huître de roche. Ce sont des espèces qui sont élevées sans utilisation de farines animales pour les nourrir et leur production nécessite moins d’émission de gaz à effets de serre. Ces espèces peuvent également avoir des capacités de bioremédiation : l’huître de roche filtre l’eau. Elles pourraient permettre de nourrir les populations humaines en préservant notre environnement.
L’aquaculture peut aussi être une solution pour restaurer des milieux. Cette aquaculture de restauration a pour but de produire des animaux dans l’idée d’équilibrer un écosystème où il y a un manque. Il pourrait être possible de réintégrer des herbivores dans des milieux où ils ont disparu à cause de la surpêche. Cela permettra d’empêcher la colonisation des coraux par les algues qui les étouffent, en l’absence d’herbivores pour contrer ce phénomène.
Certaines espèces pourraient également servir à purifier l’environnement. C’est le cas de l’holothurie qui est une espèce détritivore : elle peut nettoyer le sable de la pollution organique due aux ruissellements des bassins versants (sédiments, contaminants, matière organique). Des tests sont en cours à l’Ifremer pour confirmer son intérêt aquacole pour bioremédier des zones enclavées comme les lagons.