Yves Sillard : une vie au service de la science, aux confins de l’espace et l’océan
La tête dans les étoiles
Ce Normand, né à Coutances en 1936, a successivement fréquenté les bancs de l’Ecole polytechnique puis de l’Ecole nationale supérieure de l’aéronautique et de l’espace (Sup’Aéro). Entré dans le corps des ingénieurs militaires de l’Air, il débute sa carrière par une affectation de cinq ans jusqu’en 1964 à Colomb-Béchard puis à Cazaux au sein du centre d’essais en vol aujourd’hui rattaché à la Direction générale de l’armement (DGA).
Après un passage au Secrétariat général de l’aviation civile (programme Concorde), il a intégré le CNES (Centre national d’études spatiales) en 1965 en tant que responsable de la construction du Centre spatial guyanais à Kourou, dont il devient plus tard le directeur de 1969 à 1971, sa nomination récompensant ainsi son engagement et sa dévotion pour ce nouveau centre. Il sera un acteur majeur du programme Ariane, aboutissant au premier vol du lanceur en 1979. Il poursuit sa carrière comme directeur des lanceurs puis directeur général du CNES de 1976 à 1982 sous la présidence d’Hubert Curien (ce dernier lui-même premier président de l’agence spatiale européenne).
Cap sur l’océan
En 1982, Yves Sillard a mis le cap sur une nouvelle frontière alors largement inexplorée : l’océan. Il a pris la direction du Centre national pour l’exploitation des océans (CNEXO). Avec son homologue Jean-Paul Troadec, directeur de l’Institut scientifique et technique des pêches maritimes (ISTPM), il conclut le mariage entre les deux instituts et devient le premier président de l’Ifremer, un organisme unique en Europe qui aborde la totalité des domaines scientifiques touchant aux mers et aux océans.
Parmi les projets qu’il a soutenus pendant son mandat à l’Ifremer, on peut citer la première campagne du Nautile en 1985, dont l’objectif était l’exploration des fosses océaniques et l’étude des phénomènes de sismicité au Japon, ou encore la mise au point du sonar acoustique remorqué (SAR) qui a permis notamment la co-découverte de l’épave du Titanic en collaboration une équipe américaine en 1985. Sans oublier l’utilisation des images fournies par les satellites SPOT (alors développés par le CNES) à des fins de gestion du littoral, ouvrant ainsi la voie à l’océanographie spatiale.
François Houllier, Président-directeur général de l’Ifremer : « L'Ifremer hérite très largement de l'initiative d'Yves Sillard de regrouper les chercheurs et ingénieurs du CNEXO et de l'ISTPM afin de développer, dès 1984, des programmes intégrés dédiés aux ressources vivantes, à l'environnement et aux recherches océaniques, à l'ingénierie et à la technologie. Le parcours d’Yves Sillard trouve aujourd’hui un écho dans tous les projets où l’observation spatiale vient alimenter la connaissance de l’océan et dans France 2030, où l’ambition spatiale et l’exploration des grands fonds marins se côtoient. »
Pour le succès des armes de la France et la construction des coopérations européennes de défense
La très brillante carrière accomplie par Yves Sillard et ses qualités remarquables de force de travail et d’intelligence mènent en 1989 à sa nomination en tant que Délégué général pour l’armement. A la tête de la Délégation générale pour l’armement de 1989 à 1993 (aujourd’hui dénommée direction générale de l’armement – DGA), son expérience européenne a été un précieux atout pour contribuer au lancement de programmes d’envergure, tant nationaux (programme Rafale notamment) qu’en coopération européenne avec plusieurs pays partenaires (frégates Horizon, hélicoptères Tigre et NH90). Il a également soutenu activement les industriels français à l’export, avec de nombreux succès sur plusieurs programmes (Mirage 2000-5, frégates, char Leclerc). Déterminé, et doté d’une grande capacité de conviction, il a aussi contribué à la transformation de l’industrie française de défense (transformation du statut étatique des arsenaux terrestres et maritimes vers des sociétés nationales industrielles - GIAT, DCN -, consolidations industrielles dans l’électronique et les missiles).
Emmanuel Chiva, Délégué général pour l’armement : « Tout au long de son mandat, Yves Sillard a réussi à renforcé la légitimité de la DGA au sein du ministère des Armées et l'a inscrite dans une dynamique d’adaptation et d’innovation permanentes qui se poursuit encore aujourd'hui. »
Après avoir quitté la DGA en 1993, Yves Sillard est nommé PDG de DCI et occupe ensuite la fonction de secrétaire général adjoint chargé des affaires scientifiques et technologiques de l'OTAN entre 1998 et 2001.
Il deviendra ensuite un membre actif de l’académie de l’air et de l’espace pour promouvoir sans cesse la coopération européenne pour l’accès indépendant à l’espace.