Plus de 2600 sorties de méthane découvertes dans le Golfe de Gascogne : que devient ce gaz dans l’océan ?
« La concentration en gaz est suffisamment importante pour que celui-ci s'échappe sous forme de bulles du fond marin dans l'eau de mer, explique Stéphanie Dupré, géophysicienne et spécialiste des fluides à l’Ifremer. Nous avons observé ces échappements de méthane sur 2612 sites, tous situés à faible profondeur d’eau, entre 140 et 220 m, le long du bord du plateau continental aquitain».
Les fonds marins sont recouverts de carbonates dits authigènes dérivés du méthane. Ces roches sont des sous-produits de la circulation de ce gaz. Elles forment des chaussées et des monticules de plusieurs mètres de diamètre en moyenne et de moins de 2 m de haut.
En se basant sur le taux de croissance classique de ce type de carbonates, les scientifiques ont déduit que la circulation du méthane a débuté depuis au moins quelques milliers d'années.
L’origine de ce méthane encore mystérieuse
« Ce méthane n’est pas lié à la présence d’hydrocarbure profond comme c’est souvent le cas, souligne Stéphanie Dupré. C’est un méthane microbien issu de la dégradation de la matière organique présente dans les sédiments ». Il pourrait provenir des couches de dépôts sédimentaires très riches en matière organique datés du Pléistocène (-2,58 millions d'années à ¬-11 700 ans) ou encore plus récents, mais pour le savoir, « nous devrons pousser l’enquête plus loin par des investigations sismiques, des carottages et des forages ».
144 tonnes de méthane s’échappent chaque année
La quantité de méthane libérée du fond dans la colonne d'eau a été estimée à 144 tonnes par an sur l’ensemble de la zone. Une quantité à relativiser en comparaison avec celle rejetée chaque année par les bovins en France qui atteint un million de tonnes. Mais cette découverte invite à penser que du méthane peut s’échapper à d’autres endroits encore inconnus.
« La quantité de méthane relarguée dans les océans est peut-être plus importante que ce que l’on pensait jusqu’alors », suggère Stéphanie Dupré.
Tout ce méthane ne rejoint pas l’atmosphère, une partie se dissout ou s’oxyde dans la colonne d’eau, une autre précipite sous forme de carbonate. Pour évaluer la part des volumes de chacun, de nouvelles acquisitions de données sont nécessaires. Le méthane a un pouvoir de réchauffement 28 fois supérieur à celui du CO2. Il est donc essentiel d’étudier plus précisément son devenir dans l’océan et son éventuel passage dans l’atmosphère pour déterminer sa contribution au réchauffement climatique.