Covid-19 - L'Ifremer uni et solidaire
« Voilà maintenant plus de 15 jours que nous vivons une crise sanitaire sans précédent. Depuis le 16 mars, l’Ifremer a pris toutes les mesures pour protéger ses personnels, dans l’hexagone comme outremer, garantir la continuité de ses fonctions vitales et préserver la possibilité de poursuivre ses recherches, assure François Houllier, Président-Directeur général de l’Ifremer. Les navires de la Flotte océanographique françaises sont à quai ; seul l’Atalante est encore sur le chemin de retour depuis le Pacifique. Nous avons organisé la solidarité avec la communauté médicale par des dons de masques, de gants, de réactifs et par le partage d’équipements analytiques pour la détection du virus. Dans cette période inédite, les équipes de l’Ifremer donnent aussi de leur temps pour vous raconter des histoires de sciences et de passion, sélectionner le meilleur de leur trésor d’images et vous emmener dans leurs aventures scientifiques sur tous les océans du monde. »
La très grande majorité des personnels poursuivent leurs activités en travaillant à distance
Confinées, les équipes de l’Ifremer restent concentrées sur leurs objectifs de recherche, d’expertise et d’innovation. La matière grise de l’institut phosphore désormais essentiellement grâce au télétravail, qui concerne la très grande majorité de ses 1491 salariés.
La surveillance sanitaire du milieu marin se poursuit
Seules 142 personnes conservent un accès physique aux implantations de l’Ifremer en métropole et dans les outremers. Identifiées dans le cadre d’un plan de continuité d’activités, elles assurent des missions vitales pour le fonctionnement de l’institut, pour la sauvegarde des projets de recherche engagés et pour la surveillance sanitaire des milieux marins. Leur travail s’inscrit dans la stricte observance des gestes barrière et des mesures de distanciation sociale.
Les navires de la Flotte Océanographique Française sont à quai
Présente sur tous les océans du monde, la Flotte Océanographique Française a appelé ses navires à regagner leurs ports d’attache. Toutes les campagnes scientifiques en cours ont été arrêtées et toutes les missions prévues en 2020 sont annulées jusqu’à nouvel ordre. En savoir plus
Des soutiens à nos soignants
Tout comme dans le monde médical, les laboratoires de recherche de l’Ifremer observent des procédures strictes pour garantir un environnement stérile autour de leurs expériences. Masques, gants, sur-chaussures font donc partie de la panoplie habituelle du chercheur mais manquent aujourd’hui cruellement à l’appel dans les hôpitaux. Parce que ces derniers en ont aujourd’hui un besoin vital, l’Ifremer a fait don de ce matériel aux équipes soignantes de notre pays.
COVID-19 : tracer la diffusion du coronavirus (2019-nCoV) dans l'environnement
11 pays européens se mobilisent à travers le projet VEO
Dans le contexte de pandémie actuelle, la recherche en virologie s’accélère. Initialement prévu pour débuter en juin, mais déjà initié, le projet européen VEO « Observatoire polyvalent des maladies infectieuses émergentes » est coordonné par le département de virologie du Centre hospitalier universitaire Erasmus à Rotterdam : « il vise à trouver des critères et des outils pour prévenir l’émergence de nouveaux virus capables d’affecter la santé humaine », explique Soizick Le Guyader, la responsable du laboratoire Santé environnement et microbiologie de l’Ifremer. « Ce projet implique 19 équipes de 12 pays dont 2 équipes françaises (Institut Pasteur et Ifremer), et à l’Ifremer, nous démarrerons dès que possible un travail d’analyse des séquences virales du coronavirus présentes dans les eaux usées. Notre objectif est de développer une méthode d’analyse efficace, standardisée et transposable dans tous les pays afin d’être en mesure de prévoir sa diffusion dans l’environnement ». Le coronavirus est-il résistant aux traitements classiques des eaux usées dans les stations d’épuration ? Peut-on le retrouver dans l’eau du robinet ? Dans l’eau de mer ? Dans nos coquillages ? « Nous manquons de données sur la propagation du coronavirus dans le milieu marin, étant donnée son apparition récente. Des premières publications chinoises montrent néanmoins que le virus est peu excrété dans les selles (10 à 100 fois moins que le norovirus responsable de la gastro-entérite) et qu’il persisterait deux fois moins longtemps dans l’eau. De plus, sa nature de virus « enveloppé » le rend plus fragile. Le risque qu’il se propage via les eaux usées est donc réduit mais il peut exister ». En savoir plus sur le projet VEO
Les scientifiques de l’Ifremer se posent des questions sur les impacts du coronavirus 2019-nCoV sur la biodiversité marine
A l’Ifremer, les scientifiques s’interrogent sur les conséquences de la pandémie mondiale de covid-19 sur le milieu marin. Même si les questions restent encore très ouvertes vu l’émergence récente du coronavirus 2019-nCov, voici quelques pistes de réponses.
- Y a-t-il un impact du confinement sur la biodiversité marine ?
Alain Biseau, biologiste à l'Ifremer et membre du comité d’avis du Conseil international pour l’exploration de la mer : la question peut se poser par rapport à la baisse importante de l'activité de pêche depuis le confinement de la population. Une baisse des captures au printemps sera probablement observée. Aura-t-elle un impact réel sur l'état des populations de poissons ?
Tout dépend du cumul des captures sur toute l’année : c’est ce cumul qui définit la pression de pêche et qui déterminera l’état des populations. La baisse actuelle des captures sera-t-elle compensée ou non plus tard dans l'année ? Les captures totales sur l’année seront-elles équivalentes ou non à celles qui auraient eu lieu en l’absence de Covid-19 ?
- Le coronavirus pourrait-il se diffuser dans le milieu marin ?
Soizick Le Guyader, virologiste, responsable du laboratoire Santé environnement et microbiologie de l’Ifremer : les scientifiques manquent de données sur la propagation du virus dans le milieu marin, étant donnée son apparition récente. Il semblerait a priori que le virus soit peu excrété dans les selles ; il ne risque pas forcément de se propager via les réseaux d'eaux usées. De plus, sa nature de virus « enveloppé » le rend plus fragile.
Ces deux caractéristiques en font un virus très différent de ceux retrouvés plus fréquemment dans les eaux côtières, comme les norovirus qui peuvent être à l'origine de gastroentérites aigües suite à la consommation de coquillages.
- Depuis l’émergence du Covid19, on évoque les risques d’émergence de nouvelles maladies attribués aux interactions Homme/Faune sauvage. Existe-t-il des maladies transmissibles des espèces marines aux humains ?
Philippe Goulletquer, océanographe, directeur adjoint à la direction scientifique de l’Ifremer : en dehors du cas des toxines produites par des espèces particulières de micro-algues, ou par certains poissons et coquillages (venins), il n’y a pas d’exemple de maladies humaines qui proviendraient directement du milieu marin. Seuls quelques cas de transmission à l’homme de parasites et de microorganismes d’origine marine par des mammifères marins ont été rapportés.
A contrario, des mammifères marins peuvent contracter des maladies humaines comme la grippe. Les norovirus responsables de gastroentérites aigües survivent en milieu marin mais sont issus du milieu terrestre, véhiculés via les eaux usées.
Il y a bien des milliards de virus dans le milieu marin, mais ils ne sont pas transmissibles à l’homme. On peut citer le cas de l’Herpes virus, bien connu pour ses effets sur les élevages conchylicoles, mais sans impact sur les humains.
- La mer pourrait-elle être source de médicaments contre le coronavirus ?
Philippe Goulletquer, océanographe, directeur adjoint à la direction scientifique de l’Ifremer : le milieu marin peut être source de médicaments, notamment de molécules antivirales issues par exemple d’éponges ou d’algues. La griffithsine, molécule isolée à partir d’algues rouges, a déjà démontré son pouvoir inhibiteur sur le virus à l’origine de l’épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) de 2003. La question pourrait donc se poser de l’utilisation de telles molécules pour lutter contre le coronavirus.
Une autre molécule de la société morlaisienne Hemarina obtenue à partir du sang d’un ver marin arénicole sera testée sur des premiers patients atteints du Covid-19. Si elle ne guérit pas le coronavirus, sa capacité oxygénante pourrait favoriser la guérison des malades en détresse respiratoire aiguë.