Série Rivages : Est-ce réellement possible de voir une raie de la taille d’un immeuble ?

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La série Rivage a pris fin hier. Qu'avez-vous pensé de cette immense raie qui produit de la lumière ? Pensez-vous pouvoir en croiser une aussi grande un jour ? La fiction est-elle proche de la réalité ?

Les raies font partie de la famille des élasmobranches, tout comme les requins. Voyons aujourd’hui de plus près leurs différentes tailles. Le saviez-vous ? La raie Manta océanique (Mobula birostris) est la plus grande raie du monde. Impressionnante par sa taille, elle peut atteindre jusqu'à 9 mètres de long, 7 mètres de large et peser près de 3 tonnes... Ces géantes habitent les eaux tropicales. Pour le moment aucune chance de les retrouver aujourd'hui dans la Manche.

La Manche abrite 13 espèces de raies couramment observées, et 6 autres, plus rares ou situées en limite de leur zone de distribution. L’aigle de mer commun (Myliobatis aquila), la plus grande raie observée dans la Manche, mesure jusqu'à 2,6 mètres de long pour 1,5 mètre de large. Les autres espèces locales, comme le pocheteau gris (Dipturus batis), atteignent des tailles plus modestes de 1,5 mètre en moyenne. Celui qui se rapprocherait le plus d'une raie de la taille d'un immeuble en manche serait le requin pèlerin, cousin de la raie, pouvant mesurer jusqu'à 15 mètres de long

La bioluminescence est quant à elle est visible chez certains requins de grande profondeur comme le sagre commun (Etmopterus spinax). Observé en mer Celtique, ce phénomène offre des avantages en termes de camouflage et de communication intra-espèce mais pas pour les raies.

Les recherches de l'Ifremer sur les élasmobranches en Manche

En collaboration avec l'INRAE, l'association Des Requins et Des Hommes et la Réserve naturelle des Sept-Îles, l’Ifremer participe au programme eWHALE pour étudier le requin taupe commun (Lamna nasus), notamment via l'ADN environnemental. Cette approche non invasive permet d'identifier les groupes familiaux fréquentant la zone au large de Perros-Guirec, principalement des femelles, et d’étudier également les espèces de poissons présentant un intérêt en termes de conservation.

L’Ifremer coordonne un programme d’auto-échantillonnage impliquant les pêcheurs professionnels de Manche Ouest, pour suivre la population de raie mêlée (Raja microocellata). Cette collaboration permet de mieux connaître les populations de raies rares ou interdites de débarquement, en recueillant des informations sur leur répartition et leur taille.

Survie et migration des raie relâchées en mer 

L’Ifremer conduit des recherches sur les raies accidentellement capturées et remises à la mer, dans le cadre de l’obligation de débarquement. En marquant les individus relâchés, les chercheurs peuvent suivre leurs déplacements, améliorant ainsi la compréhension de leur mode de vie et de leurs relations avec leur environnement.

D’autres études sont réalisées dans le golfe de Gascogne notamment le programme AGEPPOP qui vise à estimer la population de raie brunette (Raja undulata). Les scientifiques y explorent une nouvelle méthode basée sur un outil moléculaire (le degré de méthylation de l'ADN) pour déterminer l’âge des raies. C’est une méthode peu invasive qui nécessite de prélever un seul petit bout de leur nageoire à la différence de la lecture des anneaux de croissance sur les vertèbres qui implique la mort des poissons.

Ces initiatives de recherche sur les élasmobranches en Manche et ses environs reflètent un engagement envers la conservation des raies et des requins, et visent à mieux comprendre leurs écosystèmes. 

Même si l’océan nous réserve encore de nombreuses surprises, l’existence en Manche d’une raie lumineuse de la taille d’un immeuble n’en ferait pas partie. Il reste que les raies et les requins ici présents, de taille plus raisonnable, jouent un rôle fondamental en tant que régulateurs des chaînes alimentaires et alliés insoupçonnés du phytoplancton, ces plantes microscopiques qui produisent la moitié de l’oxygène que nous respirons.