Changement climatique : une mission en Arctique pour mieux comprendre l’évolution des interactions entre la glace de mer, l’air et l’océan
Deux chercheurs et deux ingénieurs du laboratoire d'océanographie physique et spatiale de l’Ifremer partiront ce 5 septembre pour rejoindre l’océan Arctique et les 55 scientifiques de la campagne océanographique Refuge Arctic dirigée par Mathieu Ardyna, chercheur CNRS au laboratoire international de recherche Takuvik au Canada. Ils prendront place à bord du NGCC Amundsen, navire brise-glace de la Garde Côtière Canadienne. L’objectif de cette mission est de mieux comprendre la façon dont le changement global influence l'écosystème et les cycles biogéochimiques de l'océan Arctique en s'appuyant sur ce refuge emblématique du changement climatique, la Mer de Lincoln, située au sud de la région de Tuvaiijuittuq, où la couverture de glace, pérenne depuis la dernière période interglaciaire, est la plus importante.
Cette région joue un rôle capital pour le climat de l’hémisphère Nord grâce à l’effet « albédo » (la couverture de glace réfléchit les rayons du soleil et régule l’apport de chaleur sur terre), et à l’effet refroidissant de ces grandes étendues de glace sur les masses d’air. Mais au rythme où la glace de mer fond en Arctique, ces effets vont-ils perdurer et réguler les températures de l’atmosphère de l’hémisphère Nord encore longtemps ? Au cours des 40 dernières années, l'étendue de la glace de mer de l'océan Arctique a en effet diminué de 10-15% par décennie, et la glace pluriannuelle (ayant survécu à au moins un été et excédant généralement 1,5 mètres) a diminué de 70 % sur cette même période, mettant en péril tout un écosystème dépendant de la glace de mer.
Mais avant de pouvoir étudier ce secteur, l’équipe doit relever un défi de taille : remonter le détroit de Nares pour atteindre la mer de Lincoln, où la couverture de glace est par endroit si épaisse, que le navire brise-glace pourrait ne pas réussir à passer.
Ces instruments, préparés par le service Technique d'Observation In Situ (TOIS) de l’Ifremer, seront nombreux : bouées dérivantes équipées de capteurs pour mesurer l’énergie des vagues, drones pour cartographier et reconnaitre le type de glace à la surface ou encore un petit navire autonome (conceptualisé et fabriqué à l’Ifremer) pour mesurer la turbulence de l’océan, les courants, la vitesse du vent, les radiations du soleil et le transfert de chaleur entre l’eau et l’air.
L’Ifremer déploiera également pour la première fois un véhicule sous-marin autonome (AUV) sous la glace pour y mesurer la température et la salinité de l’eau, mais également pour avoir des observations sous la surface de la glace permettant de caractériser sa solidité.
Cet embarquement est rendu possible grâce à un partenariat transatlantique signé le 10 février 2022 entre l’Université Laval et l’Ifremer. Grâce à cet accord, les chercheurs canadiens peuvent embarquer sur les navires océanographiques français qui sillonnent l’Atlantique Nord, et réciproquement, les Français ont accès au brise-glace NGCC Amundsen.
Des opérations scientifiques inédites dans la dernière zone de glace grâce au programme REFUGE-ARCTIC